I2ACd

Images d’images de l’art dit conceptuel

  • Mamco, Genève, 24 février-30 mai 2009
  • École nationale supérieure des beaux-arts, Dijon, automne 2009

Présentation

La dénomination « art conceptuel » suppose un art dématérialisé, essentiellement producteur d’énoncés et indifférent à ses modalités de manifestation physique – peinture, objet, documents, installation ou image en général –, du moins selon son mythe d’origine. Cette position de principe est lisible dans des titres d’ouvrages ou d’expositions de groupe comme : Konception/Conception ; If I had a mind ; Concept Art ; Conceptual Art ; Koncept Kunst ; Idea Art ; Information ; Art in the Mind, etc., sans parler du fameux ouvrage de Lucy Lippard, Six Years: The dematerialization of the art object from 1966 to1972.

La même dénomination a pu aussi revêtir une acception beaucoup plus large, un discours critique réprobateur plaçant dans ce même « sac » tout l’art des néo-avant-gardes du début des années 1970, et traitant de « conceptuel » Joseph Beuys, aussi bien que Daniel Buren , Richard Long ou Mario Merz ! Si l’on s’en tient au mythe de départ et à l’idéal visé par les notions de concept et de dématérialisation, la liste des œuvres et des artistes concernés est plus restreinte : Mel Bochner, Bernar Venet, Joseph Kosuth, Sol LeWitt, Lawrence Weiner, Art & Language, Robert Barry, Douglas Huebler, Ian Wilson, Stanley Brouwn, On Kawara et quelques autres.

Les œuvres de ces artistes, ou plus précisément celles de leurs œuvres qui furent les plus proches de cet idéal de dématérialisation et se voulurent strictement conceptuelles, ces œuvres se sont-elles réduites à de pures idées, à de seuls énoncés dématérialisés ? Une enquête sérieuse, examinant l’ensemble des publications à travers lesquelles cet art s’est diffusé, montre au contraire qu’il s’est manifesté massivement en tant qu’images : reproductions de pages de revues, d’inserts dans la presse, de couvertures de livres, photographies d’installations, de documents au mur, ou d’espace vide, fiches et fichiers, pages blanches avec énoncé lapidaire au centre, tableaux et schémas, annonces sur des panneaux publicitaires dans l’espace urbain, tables jonchées de documentation, autoportraits de l’artiste assis à son bureau, etc. Il faut en conséquence prendre le label « Art conceptuel » comme une dénomination d’usage, et ne pas séparer cet art du procès nominaliste qui le désigna comme tel. Plutôt y mettre des guillemets et parler de « l’art dit conceptuel ». Et soutenir qu’il existe bel et bien une iconographie de l’art conceptuel.

La présente enquête repose plus précisément sur le dépouillement d’un ensemble quasi exhaustif des catalogues de groupe et livres relatifs à cet art. Pour les revues, nous nous sommes limités aux années 1968-1975, et nous avons omis les recensions d’expositions dans les quotidiens et autres périodiques non spécifiquement artistiques. Les livres d’artistes ne sont pas reproduits mais une sélection est placée sous vitrine. Parmi plus de 400 photographies réalisées, seule la moitié est exposée (nous avons éliminé de nombreuses redites). Les images ont été regroupées en vue d’esquisser une sorte de typologie. On en a suivi aussi quelques unes d’ouvrage en ouvrage, dans leurs multiples variations. Toutes les pages d’ouvrages sont reproduites à l’échelle 1.

Telle quelle, cette exposition entend montrer ces images de l’art dit conceptuel, et même pointer que lesdites images, reprises et diffusées, sont souvent des images d’images. Pour cela nous avons mis en évidence notre propre opération de reproduction par le fond noir sur lequel les ouvrages ont été disposés pour être reproduits. Il s’agissait de revisiter tout un pan de l’histoire de l’art autour de 1970, et de le faire sans grands commentaires : juste montrer une collection assez large des images d’images de l’art (dit) conceptuel : I2ACd.

Qui a fait quoi

  • Fonds documentaire : les Archives modernes (Dijon)
  • Recherche : Laboratoire des mondes possibles, institut de recherche du domaine des Arts visuels de la HEAD – Genève.
  • Conception et réalisation : Christian Besson & Valérie Mavridorakis
    Photographies : Angèle Laissue